« Allez maman ! Réveille toi ! Tu dois chasser l'dîner ! Grouille toi, je crève de faim ! Tu laisserais pas ton gamin mourir comme une pourriture hein ? T'es pas comme ça, pas vrai ? Alors, lève toi bordel ! Lève toi ! »

Une nouvelle fois depuis deux jours, il posa sa petite patte noire sur le poitrail de la belle louve et fit poussa fermement tout en étant doux. Mais, peu importe la force et la détermination qu'il mettait, sa mère s'éteignait, son flambeau tendu au seul héritier de la famille qui semblait ne pas s'en rendre compte. Innocemment, il l'a suppliait, tantôt insolemment, tantôt tristement. Et malgré les tentatives vaines, son espoir restait toujours aussi solide. Même si, au fond de lui, il se doutait qu'elle n'allait plus jamais ré-ouvrir ses beaux yeux bleus ciels... Et cette idée lui brisait le coeur, le peu qui lui restait. Il n'y avait que les vers et les quelques animaux curieux qui osaient s'approcher des deux loups... L'ambiance était si pesante que rien ni personne ne venait... Peut-être qu'une partie isolée de lui voudrait bien que quelqu'un intervienne ? Que quelqu'un vienne briser cette bulle qui couvrait les deux, que quelqu'un vienne simplement l'aider... Est-ce-qu'un loup aussi téméraire et courageux que sa tendre génitrice vit sur cette Terre ? Sûrement pas...

Il allait somnoler, mais quand il sentit une odeur étrangère, son poil s'hérissa lentement, ses babines vinrent se lever et ses oreilles pointer vers le ciel...

« Elle ne se réveillera pas mon petit. »

Un grognement s'échappa de sa gueule. Maladroitement, il tenta de se lever, tomba, puis recommença. Toute cette détermination en lui était impressionnante, elle se reflétait dans ses pupilles vairons. Il avait ce regard qui disait "je me relèverai toujours". Il se mit face à la forte femelle et l'a dévisagea, les crocs à l'air. Sa voix était rauque, cassée et pleine de méfiance :

« Et qu'est-ce-que t'en sais, hein ?! Elle va se réveiller ! Elle est juste un peu fatiguée ! C'est la plus forte des louves en ce monde ! Tu vas voir ! Allez maman, montre lui, hein, montre lui que t'es la meilleure, maman... Allez... »

Poussant le corps inerte de sa génitrice du bout de sa patte arrière, il affrontait courageusement le regard de l'étrangère avec méfiance mais détermination. Il ne la laissera pas toucher à sa mère ! Il y donnera sa vie ! Son poitrail se soulevait lourdement, ses côtes saillantes avaient dû alerter la nourrice sur l'état de santé du louveteau.

Cette aura de douceur qui émanait de la femelle fut la chose la plus tendre et la plus réconfortante que Solembum puisse observer de son vivant. Rien de plus maternelle n'existait. Toute cette gentillesse, tous ces gestes doux... Il n'avait jamais connu ça. Sa naissance même consistait à un test, un entraînement. Toute sa vie il avait été entraîné pour faire perdurer sa famille, pour prendre la place du trône. Jamais il n'avait connu ça. Ça le rendait heureux et en même temps ça le brisait encore un peu plus. Le noiraud avait apprit que tout étranger était ennemi. Mais, il n'avait plus la force physique pour lutter, alors, innocemment, il espérait qu'un loup bon existe en ce monde et que celui-ci se trouve face à lui en ce moment. Pelage contre pelage, il émit des petits bruits inaudibles. Il voyait trouble. Ces yeux étaient noyés de larmes qui menaçaient de s'écraser le long de ses joues à tout moment... Il tentait de les contenir, le plus possible. Le louveteau tremblait comme une feuille, il ne savait pas quoi faire. Il voulait rendre fier sa mère, plus que tout au monde. Il se sentait minable.

Jamais il n'avait été aussi faible. Ses parents lui avaient toujours répété "Les larmes sont les armes des faibles". Il avait l'interdiction de pleurer, c'était comme ça. Il n'avait pas pleuré lors de la mort de sa mère ni lors de la disparition de son père. Il avait affronté. Il ne tourna pas le dos, comme il l'avait toujours appris. Les manières cruelles d'apprendre que ses concepteurs on utilisé sur lui lui seront toujours gravées dans son être. Il ne pourra jamais se défaire de ses habitudes, bien que ce ne fut que quelques mois, c'était comme écrit dans son sang, dans ses gènes... Collé de cette façon à la femelle, il réussi l'exploit d'oublié le corps de sa génitrice pendant quelques secondes. Mais, l'odeur insupportable de la mort le fit revenir à la raison et la voix de l'inconnue aussi :

« Viens avec moi, je t’offrirais une nouvelle vie. »

Il leva ses yeux vers elle. Deux yeux, l'un rose, l'autre bleu, ils avaient un point commun : Ils mourraient tous les deux, noyés sous les larmes. Il fit l'erreur de fermer ses paupières, les pupilles se libérèrent, toutes les larmes roulèrent sur ses joues et il pleura, il fut pris d'une crise de sanglot qu'il ne pouvait arrêter, il avait était impuissant. Il n'avait rien pu faire. Il a laissé sa mère mourir sans rien dire.

« S'il te plaît... ! J-je... Mère m'avait... Elle m'avait dit de ne jamais tourner le dos... J-je... Je veux rester avec toi ! Je ne veux plus être faible ! »

Pleurant chaque goûtes de son corps, il criait et tourna complètement le dos au corps de sa mère pour se réfugier dans le pelage de la femelle. Il pleura encore et encore. Un petit lien grisâtre venait lier le louveteau à la nourrice et dans le plus doux des gestes, il enroula les deux dans une étreinte pleine de tendresse. Il ne s'était même pas rendu compte qu'il venait d'utiliser son pouvoir et pour la première fois ce n'était ni pour se défendre ni pour attaquer. Juste pour se lier à elle. Pour être un peu plus contre elle... Elle pouvait le voir ce lien, il lui avait autorisé.

« Solembum... Je suis Solembum. » Conclu-t-il en reniflant, les yeux rougis.

Son tout petit coeur semblait exploser avec fureur dans sa poitrine. La petite boule de coton qu’était sa vie venait de s’envoler, comme un grain de sable emporté par le vent. Les yeux imbibés de larmes, il ne voyait plus rien. Tout était flou. Le futur aussi était flou. Bien qu’il avait la certitude de passer le restant de sa vie au côté de la louve étrangement maternelle. Serai-ce un don que la nature lui avait donné, d’être aussi maternelle ? Ou est-ce-que c’est naturel ? Dans les deux cas, cela était incroyable. Solembum ne pouvait pas la regarder en face, elle l’éblouissait tellement, comme un soleil. Il voyait en elle le reste de sa vie et ça l’excitait. Il savait que sa mère serait toujours à ses côtés, cela fait un moment qu’elle est morte, au fond, le louveteau s’est fait à l’idée, s’était seulement trop dur de quitter le cocon familial. L’oisillon venait de déployer ses ailes de la liberté, il pouvait dorénavant quitter le nid et faire sa vie. Il ne comprenait pas ce qu’elle lui disait, tout lui était inconnu. Un alpha ? Hikari ? Qu’est-ce-que tout ça ? Il n’en avait aucune idée et pourtant le noiraud savait qu’il pouvait faire confiance à Erin. Comme si ça avait toujours été comme ça. C’était une sensation étrange et il paniquait à cette idée. Le jeune angoissait parce qu’il ne connaissait pas cette émotion. C’était comme si une horde de papillons s’entrechoquait dans son ventre. C’était divinement excitant. La lueur qui brillait dans ses yeux était en premier lieu dû aux larmes qu’il avait versé, mais en second lieu, à cette excitation de l’aventure.

L’alpha semble être leur chef. Solembum se faisait l’image d’un grand loup, bien plus haut et bien plus gros que les autres, avec des crocs bien plus grands et des griffes bien plus acérées. C’était, pour lui, un royal loup noir. Et Hikari était sûrement le nom de cet Alpha, il avait donné son nom à sa meute, non ? Le jeunot venait de faire un pas dans un monde qui lui était totalement inconnu. Il ne savait vraiment pas à quoi s’attendre. Le beau visage triangulaire de la femelle le ramena à la réalité, ils marchèrent ensemble, abandonnant le corps inerte de la génitrice du noiraud. Il sentit sa poitrine se déchirer de douleur, comme si on venait de lui enlever la chose la plus importante alors qu’il était persuadé que la chose la plus importante c’était sa propre vie ! Mais, apparemment, la vie de celle qui l’avait mis au monde était bien plus importante que la sienne. Il avait dû mal à croire qu’il pouvait penser comme ça. Le beau loup se faisait poussé du bout du museau pour avancer, il allait dans une direction inconnue, toujours plus loin… Erin semblait sûre d’elle et c’est ce qui mit en confiance le louveteau. Il boitait un peu, rien de très grave, c’était dû à la fatigue et au manque conséquent de nourriture. Il espérait de tout coeur que là-bas, à Hikari, il y ai beaucoup de nourritures ! Tellement qu’il ne saurait pas par quoi commencer ! Mais, peut-être se faisait-il des idées. Malgré l’envie qui le rongeait, il restait méfiant, sait-on jamais ce qui peut se cacher derrière un facial aussi angélique…

Il était resté silencieux tout le long du chemin, c’était une habitude, ses parents ne voulaient pas qu’il les dérange quand ils faisaient un voyage, alors il se taisait et écoutait la nature comme ils lui avaient indiqué. C’est comme ça que son ouïe s’était accrue. A force d’écouter chaque sons, chaque craquement de feuille, chaque pas… Il peut dorénavant détecté si un loup approche avec aisance. Son odorat il l’avait développé avec un exercice que ses parents nommaient le « cache-cache », sa mère se cachait quelque part et lui devait la trouver seulement grâce à l’odorat, c’était compliqué mais ça a porté ses fruits. Sa force, il l’avait augmenté grâce aux multiples duels auxquels il était obligé de participer avec son père. C’était fastidieux et il en a gardé de nombreuses traces sur les pattes et le poitrail. Le louveteau repensait avec nostalgie à tous ces moments et son regard coula instinctivement vers la nourrice. Il sentait qu’ils arrivaient à leur but. L’odeur de cette zone était étrangement forte. Et, comme si son corps avait pris possession de son esprit, il s’arrêta brusquement, refusant d’aller plus loin.

« Je n’ai pas le droit. Je ne peux pas. Des loups dangereux logent ici, je le sens. »

Il lança un regard interrogatoire à Erin, attendant une explication.