Je marche encore et encore. Je marche comme tous les jours. J'erre en solitaire, en espérant croiser quelqu'un qui voudra bien jouer avec moi ou bien même s'occuper de moi. Mes pattes avancent toutes seules, chaque pas crée une vibration dans mon corps qui devient insupportable. Je suis épuisée et j'ai faim. Il me faut à manger sinon je crois bien que je vais y rester.

Autrefois debout, je m'écroule désormais sur le sol. Plus rien ne va, personne ne viendra. J'observe les alentours de mon seul œil efficace. Rien. Un silence qui me fait frissonner. Je me redresse légèrement, de manière à m'allonger tout simplement. Je n'ai pas assez de forces pour me lever, je n'en ai plus assez.

La nuit tombe, l'air va bientôt se refroidir tel un bourrasque polaire qui me frappe. Je ne crois pas que je vais survivre si je reste là, alors je me mets à ramper, les yeux fermés, sans savoir où aller et qui je vais croiser. Je rampe sur la terre sèche. Je pousse un soupir soudain, je n'ai plus la force d'avancer. Je tente de pousser un appel à l'aide, il est en vain que des paroles jetées en l'air. Personne n'entendra.

- Aidez-moi.

Je ferme les yeux, je me concentre sur ma respiration. Un bruit de feuillages. C'est probablement le vent, rien de moins. Je ne prête attention à plus rien, le vent caressant les feuilles des arbres devient une douce mélodie à mes oreilles. Il faut bien croire que ce sera peut-être la dernière que je vais entendre, ou voir. Mon petit corps tremble lorsqu'il est balayé par le vent. Ma fourrure est dans un état lamentable, sans parler du fait que je suis atrocement maigre. Je pourrais tenter une dernière fois d'utiliser mon pouvoir, d'expérimenter cette sensation encore une fois. Cette sensation que j'adore et que j'adorais.

Un frisson traverse mon corps, j'ouvre mes yeux. Une certaine lueur bleue éclaire le sol à mes côtés, c'est la fumée qui s'échappe de mes yeux. Des frissons viennent m'assaillir. Ce ne sont que de petits animaux, du gibier. Mon ventre rugit pour de la nourriture. Je n'y peux rien.

Des pas rapides, une lueur d’espoir illuminant soudainement mon regard vide. Une voix m’appelant, me ramenant à moi-même. La voix d’un être divin, un être qui était là pour m’aider, pour me porter secours. Porter secours à mon petit corps gisant au sol tel une dépouille. J’étais toujours épuisée, toute force avait quitté mon petit corps, j’étais frêle, en mauvais état. J’avais marché, j’avais couru, j’avais tout fait pour m’en échapper, m’échapper de cette solitude insupportable. Ma détresse était si grande, j’avais seulement besoin d’aide, d’une voix comblant le silence qui régnait toujours autour de moi, une voix pour me rassurer. Elle était là, elle venait de m’appeler. La voix d’un ange répondant à mon appel.

- Comment vas-tu ? Qui es-tu ? Où sont tes parents ?

Tant de questions, tant de réponse. Je l’observais de mon regard vibrant d’une lueur bleutée alors que des frissons parcourait mon corps. Les mots y étaient, mais ne voulaient pas sortir. J’étais simplement stupéfaite, moi qui croyait ne pas trouver d’aide, moi qui était tant seule. Elle s’était approchée doucement, semblant voler en se déplaçant, son pelage était d’un blanc délicat, un blanc réconfortant et rassurant. Je ferme les yeux quelques instants, lorsque je les ouvre à nouveau, mes yeux ne brillent plus d’une lueur bleutée mais plutôt d’espoir. Elle s’allonge à mes côtés, elle semble vouloir m’aider, heureusement. D’une petite voix, haletant légèrement, j’ai réussi à répondre à toutes ses questions. Sans en oublier une, je suis fière de moi.

- Je – Je suis épuisée. Kishi, je suis Kishi. Je n’ai plus de parents. Je suis seule.

Je tente de faire un dernier effort pour me dresser sur mes pattes, je tremble malgré moi. J’ai l’air si faible, si innocente. Je la regarde avec un regard perdu, je soutiens son regard, elle est mon seul espoir. Elle est peut-être bien ma seule chance de survie. Je ne suis pas capable de chasser, je ne suis pas capable de me défendre, je suis incapable. Soudainement, tout devient noir, son air angélique est arraché de mon esprit si brusquement. Le silence à nouveau, le silence et l’obscurité s’emparent de moi. Non ! Non ! Je ne veux pas ! Cette torture, elle a assez duré.