Il fait nuit, je me souviens. Ses yeux verts, un beau vert pomme, il approchait doucement à travers le feuillage. Je me rappelle. Je tremblais, la respiration courte, il était si près. Comment oublier la douleur de ses crocs se plantant dans ma chair ? La pureté de mon pelage avait disparu comme la blancheur de mon âme. Cette nuit, j’avais rencontré celle que j’étais au fond de moi. Les lucioles dansaient autour de nos corps remplis de sang. Ma gorge venait de goûter à la douceur de la vie, une douceur qui avait noirci mon cœur. Je me souviens de son regard qui parcourrait mon corps, de ses griffes qui labouraient mon pelage, comme si cela c’était passé hier. Son l’expression de son visage au moment où j’absorbais sa vitalité pour me soigner, ce moment restera jusqu’à la fin de ma vie gravé dans ma mémoire. Jamais je n’avais autant eu envie de tuer.

Mon poison qui circuler dans mon corps s’intensifier. La chaleur envahissait mon pelage, je me sentais mal à l’aise. J’ouvris les paupières, le tonnerre grondait dans le ciel. La pluie s’abattait sur le sol, mon frère et maman dormait paisiblement. Mon rythme cardiaque avait accéléré, ce n’était qu’un cauchemar, le souvenir de la nuit de mon premier meurtre. Je me souviens d’avoir déplacé son corps, de l’avoir tiré dans un endroit où personne ne le trouverait. J’avais gardé secret cette nuit d’horreur, mais depuis, il hantait mes rêves et mes cauchemars. Je ne pensais plus qu’a lui, plus qu’a moi, mon poison qui augmenter dans mes veines.

Je sortis de la tanière doucement, sans réveiller personne. Je partis vers la frontière, à l’endroit où je l’avais tué, l’endroit qui avait pris mes rêves d’enfant. Je n’avais jamais pleuré cet intrus, j’avais pleuré mes actes, ce que j’étais au fond de moi. Les lucioles avaient disparu, la pluie les avait chassés. Mon pelage blanc était trempé, mes pattes étaient pleines de boue. Je me sentais lourde, seule. Les larmes coulaient contre mes joues, je ne savais pas pourquoi je pleurer, mon cœur était serré, comme prisonnier de mon propre poison.

Sans savoir pourquoi, je m’enfuyais, je courrais sans regarder le chemin, j’évitais les obstacles. Des branches arrachaient quelqu’un de mes poils blanc. Le vent fouettait mon visage, je plissais les yeux pour voir à travers la pluie et mes larmes. Tout devenait flou autour de moi, sous mes coussinets, je sentais du froid, un froid plus important que chez moi. Je m’arrêtais, les yeux remplis de larmes, la tête baissée vers le sol, je voyais la neige qui absorbé ma tristesse. Je continuais mon chemin en marchant, la lune était pleine. Je ne parvenais pas a arrêter mélancolie de mon cœur qui ne cessait d’augmenter. Des fragments d’image me revenaient en mémoire, je me rappelle de sa haine, sa colère, ses muscles, absolument tout. Je ne dormais plus, je mangeais moins. Je l’oubliais quand j’étais avec les autres, mais il revenait toujours plus vite, toujours plus fort et m’assommais de ses images qui me terrifiait a chaque fois. Ce ne pouvait être moi, pourtant, je m’étais aperçue dans son regard émeraude.

À travers, la tempête, mon corps se frayait un chemin. Je marchais sous la pluie, tel un fantôme qui hantait la terre gelée. Non loin, une odeur familière me réveilla de ce fantôme. Une tâche noire se dessinait sur la neige. Je me souvenais de cette odeur, de cette silhouette… Mon corps courut dans sa direction, je n’avais pas cessé de pleurer, mon cœur ne voulait pas se calmer. Dans un dérapage, la neige s’abattait sur le corps mutilé de Sababa. Je ne comprenais pas tout, mon museau passa sur son pelage, s’enfonçant plus profondément, comme si je désirais toucher son âme pour me réchauffer. Aucun mot ne sortait de ma gorge, rien que le son du vent et de la pluie parvenait à nos oreilles.

« Que fais-tu ici ma petite. Ce n'est pas un temps à sortir pour une jeune louve. Mais que t'arrive-t-il pour te jeter sur moi ? »

Je gardais mon museau enfoui au fond du corps de Sababa, sa voix traversait les poils jusqu’à atteindre mes oreilles, il parlait doucement, comme si notre vie en dépendait. Je ne savais pas quoi lui répondre a part lui dire que j’étais heureuse de le revoir, même à moitié mort.

L’odeur de son sang éveillait mon poison qui défilait à travers mes veines, il chauffait mon corps et mes crocs, prenaient à empoisonner le prochain que je mordrais. La pluie continuait de tomber et on était là, l’un contre l’autre sans dire un mot. Mes larmes ne cesser de couler, mais mon cœur se sentait à l’abri. Celui que j’avais tué commençait à disparaître, il partait de mes pensées quand j’étais avec les autres, cela me permettait d’oublier ce que j’étais et ce que j’avais fait.

Quelques minutes après je sortis enfin mon museau, laissant la pluie s’infiltrait à travers mon regard améthyste. Yeux dans les yeux, sans cacher ma peine, je l’observais avec attention. Ses yeux verts ressemblaient à celui qui avait perdu la vie, je le retrouvais dans ce regard vert pomme, je revoyais ses crocs et la haine qui l’animait.

« Je… Je n’arrive pas à dormir… »

Je détournais le regard, ne voulant pas le laisser hypnotiser par Sababa. Laissant la pluie glisser le long de mon corps jusqu'à toucher le sol. J’étais bien loin de chez moi, espérant l’oublier, mais où que j’aille il était présent. Je sentais le souffle du noir, de la fumée sortait de son museau, il avait l’air de souffrir, pourtant, il s’inquiétait pour moi. Dans ma petite vie, je n’avais pas rencontré beaucoup de canidés, mais le peu avait toujours eu la patte sur le cœur et prenait toujours soin de moi, comme maintenant. Aucun sourire n’était encore venu se greffer sur mon visage, c’était rare, mais cela arrivait comme pour tout le monde.

« Tu n'arrives pas à dormir ? Allez viens, on va trouver un coin et tu pourras te reposer tranquillement. »

Je sentis son souffle sur mon pelage trempé par la pluie. Un petit coup pour m’aider à repartir pour nous abriter de la tempête. Mes larmes cessèrent de couler, je prenais sur moi, heureuse de ne plus revoir le visage de ce malotru dans mes pensées. Je me sentais légère, comme si rien de tout cela ne, c’était passé, mais une fois où je serais repartie chez moi tout disparaîtra et il reviendra. Je suivais Sabba vers une caverne, on pouvait l’apercevoir au loin. Il marchait doucement pour pas que je le perde, mais peut-être aussi parce qu’il souffrait, je ne savais pas vraiment. La tête basse, je regardais le sol plutôt que l’horizon.

Arrivé à la caverne, je me secouais pour évacuer l’eau qui s’était accumulée, aspergeant davantage Sababa. C’est à cet instant qu’un seul sourire naquit sur mon visage depuis notre rencontre. Il disparut bien vite, et laisse le silence s’installer.

« Tu peux te reposer ici, si tu veux j'monte la garde pour que tu sois rassurée. Mais essaye de ne penser à rien. Tu m'expliqu'ras plus-tard. »

Dormir ? Le pouvais-je ? Même auprès de maman et Lava, je n’y parvenais pas vraiment. Je ne disais rien et tentai de nouveau l’expérience, avant de m’allonger, je m’assoyais au côté du mâle, regardant à travers la pluie le monde du dehors, puis partis tenter de me reposer.

Fermant les paupières, je me laissais glisser dans un monde inconnu. Tout était calme, je marchais à travers la meute, j’étais plus jeune qu’aujourd’hui. Je me souviens de ce jour où j’allais faire une ronde toute seule pour me changer les idées. À la frontière, je ne voulais pas reculer, ni avancer, j’étais bien. J’attendais que le temps passe, je regardais les lucioles danser autour de moi. La terre devenait molle, et les couleurs changeaient en même temps que les chants des oiseaux. Les étoiles apparaissaient pour faire disparaître le soleil. Je flottais dans les airs comme un nuage, puis il arriva. Il riait et hurler sous la lune, tel un spectre hantant la terre. Ses crocs, sa voix rauque, son regard haineux quand il vivait encore. Je me souviens le moment où son âme avait quittait son corps pour rejoindre les cieux, le passage entre la vie et la mort, je l’avais vu. Je me souviens de son regard qui était devenu blanc, j’avais mes crocs enfoncé dans sa gorge, absorbant son sang pour me soigner, jusqu’au moment où son cœur avait cessé de battre.

Cauchemardant, je sentais la chaleur m’envahir, mon poison stimuler chacun de mes membres, je ne sentais plus le sol sous mon corps, je couinais et grognais ce rêve qui passer son temps à revenir sans cesse. J’ouvrais mes paupières pour laisser pénétrer la lumière. Je ne voyais plus rien, tout était devenue floue, avec difficulté, je me remettais debout désorienté. Je montrais les crocs aux deux points vert pomme. Il était là, c’était lui, il était revenu pour m’emporter avec lui… Je jappais devant ce corps qui était fouettais par mes rêves. Les oreilles en arrière, je défendrais encore ma vie, je redeviendrais ce monstre qui aimait tuer et boire le sang des autres… Il n’était plus là, celui que je considérais comme un frère, je ne le voyais plus, mon odorat était perdus lui aussi. La peur m’envahissait, j’étais seule face à mes démons.

Il approchait encore, ses babines bougeaient, je ne comprenais pas. La dernière fois, il avait dit « Bon appétit », recommençait-il ? Ne l’avais-je pas tué ? Je sentais mon corps se réchauffer. La tache floue ne faisait rien, souriait-il ? Aimait-il me tourmenter ainsi ? Je ne fais que de penser à cette nuit, à ce que j’avais fait, son visage restait graver dans ma tête, tournant en boucle dans mes pensées, j’avais peur de ce que j’étais, mais au fond, j’aimais ce que je devenais. Je laissé mon poison envahir mon corps, envahir mon esprit.

Je montrais mes crocs, elles étaient encore petites, je n’avais pas atteint ma taille adulte, mais elle ferait tout aussi mal que ceux d’un autre. Les oreilles pliées sur le crâne, mon pelage avait pris du volume, se hérissant sur le dos. J’avais peur pour ma vie, peur de mes cauchemars qui ne cessaient de m’effrayer, je n’étais aussi forte que ma mère, j’étais l’opposé même. Pourquoi étais-je aussi faible ?

Mon poison était à son maximum, un peu plus et je ne le contrôlerais plus du tout. Je m’élançai sur la tâche floutée, ses yeux verts me fixaient sans bouger. J’entendais le craquement de la peau sous ma mâchoire. Son sang s’incrustait dans ma gueule pour finir dans mon estomac. Mon poison libéra une première quantité de sa substance. Je sentais le corps céder sous son propre poids, je ne lâchais pas mon adversaire. Les yeux fermaient, je ne voulais pas le regarder, je ne voulais pas revoir mon reflet. Je sentais mon esprit s’éclipser partiellement, pour laisser place au prédateur que j’étais. Je finis par reculer, cédant à mes peurs, mon expression changeai pour laisser transparaître un large sourire sur les babines, ce n’était pas moi, je refusais de le croire. Dominant celui qui se trouvait en face de moi, ma vision redevint celle d’autre fois. La tâche floue, devint nette. Ce n’était pas le canidé de mes cauchemars, c’était quelqu’un d’autre que je connaissais. Je ne me souvenais plus, ce n’était pas moi qui étais en face de lui. Mon corps ne bougeait plus, le noir ne détournait pas le regard. Que devais-je faire ? Je ne laissais guider par le démon qui était enfoui au fond de moi. Oubliant ma véritabe personnalitée.

Les deux points verts devenaient plus petits, comme s’il battait des paupières, la masse noire devient plus petite pour finir sur le sol. Je restais quelques instants à le regardait, observer cette masse floue. Je ne voyais plus rien, comme si je l’avais tué, je l’avais encore une fois vaincu, celui qui hantait mes rêves et mes cauchemars, celui qui ne me laissait pas vivre en paix. Je me laissais tomber sous mon propre poids, fermant mes paupières, je me laissais emporter par ce sentiment de délivrance. Je ne saurais dire combien d’heures ou de minutes avait passé, mais t’es rêve redevenait ceux du passé. Tu retrouvais ta mère et le reste de ta famille, au bord du lac de ta meute, tous réunis avec le sourire. Ton cœur se réchauffe et tu bats des paupières. Le réveil est douloureux, mais tu continues à travers la lumière.

Clignant plusieurs fois des yeux, je le vois allongé, saignait abondement. Je ne me souvenais plus de ce qui s’était passé. Je me lève inquiète pour celui qui m’avait temps de fois aidé. Je presse mon museau contre son corps, je sens sa respiration, faible peut-être, mais il vivait encore. Un soupir de soulagement sort. Je reste à ses côtés jusqu'à ce qu’à son tour, il se réveille. Mon museau sur sa plaie, je le regarde dormir. Quelques minutes après, son corps bougea, mais pas ses yeux, un mauvais rêve ?

« Sababa, t’es mort ? »

Que c’était-il passait ? Je ne me souvenais de plus rien, je me rappelle de notre rencontre, de notre arrivée dans la caverne, mais ensuite, c’est comme si j’avais dormi plusieurs siècles d’affilé. Je le regardais, la tête penchait sur le côté, tout était flou dans ma tête.

D’une douce voix, il me réconforta en me disant qu’une de ses plaies c’était ouverte, était-ce pour cette raison qu’il s’était évanouit, ou endormis ? Je ne savais pas vraiment, je ne me souvenais même pas d’avoir fermé les yeux pour me laisser emporter dans ce doux rêve. Je me levais, l’aidant du mieux que je pouvais, il était plutôt lourd. Il semblait un peu dans les vapes, c’était étrange. Pour une raison que j’ignorais, je ne pensais plus à ce malotru, à celui qui m’avait hanté depuis que je l’avais tué, pourtant j’avais la vague impression d’avoir rêvé de lui. C’était vraiment bizarre. Je ne comprenais pas vraiment ce qui s’était passé, mais je laissais le temps couler sans chercher à comprendre. Je m’approchais de le sorti e la caverne, observant la pluie tomber sur la neige. Une goute tomba sur mon museau, surprise, je me reculai et percutai Sababa. Le pauvre, lui qui tenait à peine sur ses pattes, tomba de nouveau. Les oreilles droites, un sourire vint se greffer sur mon visage. Je ne mettais pas sentis aussi bien depuis longtemps. Je vins mordiller les siennes pour m’amuser.

« Sababa, tu viens jouer dans la neige ? »

Je le poussais avec ma patte avant sans arrêter jusqu’à ce qu’il réponde. Au bout d’un moment, il finira par céder et viendra jouer. Je le poussais de plus en plus fort, pour finir, j’étais à moitié débout sur lui pour le réveiller et le faire venir jouer. Il peinait encore à se lever, comme s’il allait bientôt mourir, peut-être que c’était un jeu…

« Aller vient ! T’es pire qu’une marmotte. »

Je tirais sur son oreille doucement, pour ne pas lui faire mal. Je l’aidais encore une fois à se lever, mais il ne tenait vraiment pas debout. Je devais être à ses côtés pour pas qu’il tombe de nouveau. C’était vraiment étrange, le dernier canidé qui était dans cet état était celui qui hantait mes cauchemars. Pourquoi avais-je une drôle d’impression concernant cette plaie qui c’était ouverte ? Est-ce qu’il cacherait quelque chose ? Ou il n’était juste pas doué du tout…