Hein ? Où elle était ? Qu’est-ce qu’elle fichait là ? N’était-elle pas encore à la Rivière de Sang il y a quelques minutes à peine ? Quelques secondes même ? Elle venait à peine de fermer les yeux qu’elle les rouvrait déjà. C’était quoi cette histoire encore ? Ne pouvait-elle pas dormir tranquille ? Morphée ne voulait pas d’elle aujourd’hui ? Pourquoi faire la fine gueule aujourd’hui ? Pour une fois qu’elle n’avait pas pris le tour de garde qu’on lui proposait, voilà ce qui lui en coûtait ? Il y avait bien quelques-uns de ses camarades qui s’étaient absentés du camp depuis quelque temps, mais rien qui n’ait réellement heurté sa conscience. Alors quoi encore ? Elle se faisait du mouron pour eux ? Pour ça qu’elle ne trouvait pas le sommeil ? Qu’est-ce qui pouvait bien se passer ? Elle n’était pas du genre à s’inquiéter. Pas pour si peu. Pas pour des membres de sa meute aussi distants de sa personne. Au fond, si ses parents, ses amis et son Dastan étaient toujours à ses côtés, ça lui suffisait amplement. Pas besoin de se faire un sang d’encre pour les autres. C’est quoi toute cette brume ? Tout ce blanc… C’est trop blanc gronda une voix à l’intérieur de la louve. Trop blanc pour elle. Super le camouflage. Ce n’était pas la meilleure pour passer inaperçue cette histoire. Pas du tout même, avoir ce pelage noir donc elle était entiché depuis sa naissance. C’était encore un des tours de passe-passe de Morphée ? Un nouveau royaume qu’elle n’avait pas encore investi ? Pourtant, il lui semblait avoir déjà fait le tour de ce monde exutoire. Alors quoi ? Elle n’avait pas tout vu ? Elle rêvait. Non ? Elle était encore en train de dormir au final. Pas vrai ? Tout ce blanc. Toute cette brume. Ce ne pouvait pas être le fait d’une réalité. Si ? Quel étrange rêve alors.

Et alors qu’elle se débattait intérieurement pour dénuer le vrai du faux, la réalité du rêve, quelque chose l’appela. Une voix qu’elle n’avait jusqu’alors jamais entendue. Une voix qui résonnait comme un véritable appel auquel on ne pouvait réellement résister. Cette supplique prononcée presque à bout de lèvre, à bout de souffle, la louve pouvait visualiser sans peine un loup en train de tenir de tel propos. Pourtant, elle eut beau regarder à droite et à gauche, tenter de voir outre cet épais brouillard blanc, elle ne discerna pas l’auteur de l’appel. Alors quoi ? Elle était là pour répondre à cette voix qui venait de nulle part ? Elle devait s’enfoncer dans le brouillard ? C’est ce qu’on attendait d’elle ? Et qu’est-ce qu’elle y gagnerait d’abord ? Pourquoi est-ce qu’elle se conformerait à la volonté d’un être qui lui était inconnu ? Et pourquoi elle ? N’y avait-il pas d’autres loups sur cette Terre à venir chercher. C’est vrai, elle n’était pas la plus apte à venir en aide à quelqu’un. Si ? Décidant de briser la monotonie de l’immobilité dans laquelle elle était, la louve amorça un pas, puis un autre, l’épais brouillard l’empêchant de voir réellement là où elle mettait les pattes. Et une nouvelle fois, une clameur vint à ses oreilles. Une clameur qui n’avait plus rien à voir avec la précédente, ni par la voix, ni par la requête. La voix se prétendait être Alpha, de la meute rivale à celle d’Esha qui plus est. Elle parlait au nom de Wistala. L’Alpha était donc à ses côtés ? C’était quoi cette histoire ? Elle ne comprenait décidément rien à rien. Et après avoir effectué encore quelques pas, des ombres se dessinèrent à travers la brume. Des autres loups. Elle pouvait les sentir. Des loups de tout bord. Des Kuragari. Des Hikari. Elle pouvait sentir l’odeur particulière de Wistala, l’autre n’avait donc pas mentit. Des solitaires aussi. Suivre les autres ? Et puis quoi encore ? Pourquoi Wistala faisait-elle ce choix de se joindre aux autres ? Seule, elle n’y comprenait rien, mais peut-être qu’avec eux, elle avait une chance de savoir ce qu’elle faisait là ? Hésitante, la louve pesa le pour et le contre avant de choisir de garder le silence, attendant de voir ce qui allait bien pouvoir se tramer et quel compagnon elle allait bien pouvoir trouver.

waize

Nous voilà à présent seuls... Je prends quelques secondes pour me poser et essayer de récapituler la situation, de recentrer mon esprit. Nous sommes donc seuls sur une île dans le ciel, Rakuen - qui nous a faits venir pour semble-t-il nous sauver la vie - s'en est allée, et nous sommes là perdus au milieu d'un espèce de brouillard dont on ne sait pas plus et dans un endroit dont on ne sait pas plus. Bon. J'observe à droite, à gauche, je ne vois pas grand chose qui m'inspire confiance ni méfiance - pas plus que d'usage en tout cas.
- Venez...
Wow ! Qu'est-ce que c'est ça encore ? Mon pauvre coeur a été aussi surpris que moi. Qu'est ce que c'est que cette voix ?

Je tourne la tête dans toutes les directions. La brume... Elle bouge... On dirait qu'un passage se creuse. Quoi que ce soit ça ne m'inspire pas la moindre confiance. Et je n'ai pas la moindre envie d'y aller. D'un autre côté... On était toujours suspendus dans le ciel... Et c'est haut le ciel... Enfin... Plus que ça a l'air en tout cas... Et il me semble idiot de rester plantés devant ce chemin, qui - bien que peu inspirant - semble être notre seule chance de sauver nos vies, a priori, mais surtout de rentrer chez nous et terminer notre nuit.
- Je suis là...
Ravi de l'apprendre ! Je serai également ravi de savoir qui a prononcé ces mots et pourquoi, mais la réponse semble bien cachée derrière ce ravissant petit chemin de brume, qu'il faudra donc bien traverser.

J'observe la scène, Elemiah prend la parole, et se propose de nous guider, Wistala semble vouloir nous suivre mais garder sa souveraineté, quoi qu'il en soit, ce que dit mon Alpha, je le fais. C'est bien là mon devoir. Je ne dis rien, ma réponse semble aller de soi après tout. Je m'assieds de nouveau, observe la scène, et attends des ordres.